Mardi 22 Mars 2022
Eddy de Pretto : "Je n'ai pas envie de tourner cent mille fois autour du même sujet"
Après 3 reports (!), Eddy de Pretto foulera enfin la scène du Cepac Silo le 30 mars prochain. Dans ses bagages, un nouvel album intitulé « A tous les bâtards » et une ribambelle de musiciens bien décidés à en découdre. Il nous en dit plus sur cette tournée tant attendue.
Le début de ta carrière est marqué par ton passage sur des scènes dédiées aux jeunes talents, comme les Inouïs du printemps de Bourges ou les Inrocks Lab. Qu'est-ce que tu conseilles à nos jeunes lecteurs qui souhaitent suivre la même voie ?
J'ai été connu par la scène, à l'époque, mais aujourd'hui beaucoup de gens mettent des trucs sur Internet. Mon premier conseil, ce serait déjà de dessiner la silhouette impeccable de ce que tu veux raconter. Et une fois que tu as fait cette identification bien précise sur ton projet, tu peux le mettre sur Internet et te lancer. On m'a proposé énormément de fois de faire des choses comme la Nouvelle Star quand j'étais plus jeune et je n'ai jamais voulu, parce que je ne me sentais pas suffisamment prêt. J'ai vraiment attendu de mûrir, de travailler mon propos, d'identifier les choses que je voulais défendre pour mettre des messages dans mes chansons et que ces messages soient assez clairs et précis.
La qualité de tes textes a tout de suite séduit un large public. Comment s'y prend-on, pour écrire une chanson ?
Je n'ai pas une méthode précise, ce sont des envies, des choses qui me troublent, des questionnements sur des choses que je ne comprends pas ou que j'ai envie de comprendre. Quand tous ces ressentis prennent forme à l'intérieur de moi, les choses arrivent sur le papier de manière assez naturelle. Et là où c'est le plus compliqué, c'est quand tu sens qu'il y a potentiellement un rythme à tenir. Toutes ces questions, ces troubles, ces choses de la vie ne vont pas suffisamment vite pour écrire, écrire, écrire, continuellement. Je n'ai pas envie de tourner cent mille fois autour du même texte, du même sujet. Il faut vivre les choses. Je l'explique dans une chanson qui s'appelle Tout vivre.
Alors que Cure avait été composé exclusivement avec des machines, pour ce dernier album, tu t'es entouré de musiciens. Ça a modifié ta manière de composer ?
Totalement. Ça a permis d'aller chercher des couleurs beaucoup plus chaleureuses. En fait ça ramène une texture, une chaleur, une intensité au son. J'avais envie d'aller dans des mélodies beaucoup plus fluctuantes, plus riches, beaucoup plus mélodieuses, avec une ambition de production un peu plus haute que pour mon premier album, qui était un peu froid, un peu rigide. Là, je voulais ramener du rond, c'est ce qu'on a essayé de créer, de figer avec cet album. Je pense que c'est sur scène qu'il va être le mieux retranscrit, qu'il va se faire ressentir véritablement.
Il va ressembler à quoi, sur scène, cet album ?
Le principal décor, ce sont les musiciens. Comme pour mon premier show, c'est très minimaliste, très épuré, donc ça reste assez basique. Ce qui va venir jouer, c'est le côté chaleureux des musiciens, le côté très corporel du visuel et aussi les lumières qui sont assez reconnaissables. On a fait un travail très minutieux avec mon scénographe, François Beuchot, avec qui je travaille depuis le début. Le show est hyper beau, très coloré. C'est pop, mais une pop assez élégante.
Ce nouvel album s'intitule « à tous les bâtards ». Qui sont-ils, ces bâtards à qui tu dédies l'album ?
C'est parti de la chanson Freaks, qui dit « à tous les bizarres, les étranges, les bâtards, à tous les monstres, ceux qui dérangent, mis à l'écart ». Et ça parle exactement de ça. De comment retourner le propos, quand toute son enfance, toute ta vie, tu as toujours été appelé bizarre, étrange, pédé. Quand on te dit que t'es pas comme tout le monde. Comment tu t'accapares toutes ces insultes et comment tu en fais une force pour qu'elles te représentent de la meilleure des manières. Je voulais me réapproprier tous ces termes et les renvoyer de manière positive.
Tu as une communauté de fan impressionnante, notamment sur Tik Tok où tu les invites à chanter, mais aussi sur insta, où tu as trouvé la couverture de ce nouvel album.
Grave. J'ai essayé ! J'essaye de créer du lien avec eux. Et de toute façon on était obligés, on avait que ça donc il a fallu sortir des choses et trouver comment faire vivre un album sur les réseaux. J'ai encore beaucoup à apprendre sur Tik Tok mais sur Instagram je commence à m'y faire. C'est en me baladant sur ce réseau que j'ai vu le dessin d'une jeune fan suisse. Elle m'avait représenté de la manière la plus bienveillante possible, et je me retrouvais vraiment avec une gueule cassée. Je ne me trouvais pas très à mon avantage et j'adorais l'idée de prendre les choses à contrepied. On attendait une pochette bien lumineuse, bien dorée. Je voulais prendre quelque chose qui ne me met pas trop de valeur et créer le contact avec les fans qui ont été là pendant toute cette période de Covid et qui m'ont donné énormément de courage et d'amour pour sortir cet album.
Qu'est-ce que tu nous prépares pour la suite ?
Des choses se préparent, mais je ne peux pas encore en parler. Il y a des moments où je me force bien évidemment à écrire, parce que, comme je te le disais tout à l'heure, il y a la pression du timing. Ce rythme effréné d'aujourd'hui, qui demande de sortir des choses vite, en précipitant les émotions, ça ne fait pas les meilleures chansons. J'ai besoin de prendre le temps, de laisser la vie suivre son cours pour ensuite avoir des choses beaucoup plus claires et plus fortes à raconter.
Du bout des lèvres de Barbara
La dernière ajoutée à la playlist ?
Switched up d'Oliver Malcolm. C'est un australien fou, j'adore.
Celle qui te donne envie de t'enfuir, cheveux au vent ?
Tears in the club de FKA Twings
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