Mercredi 02 Octobre 2019
Géraldine Nakache et Leïla Bekhti : « C'est un luxe de jouer avec les gens qu'on aime »
Dans J’irai où tu iras, qui sort en salle ce mercredi 2 octobre, les deux amies Géraldine Nakache et Leïla Bekhti signent leurs retrouvailles sur grand écran. Entretien.
Elles sont de nouveau réunies au cinéma ! Dans J’irai où tu iras, une comédie dramatique qui sort aujourd’hui au cinéma, Géraldine Nakache et Leïla Bekhti campent deux sœurs que tout oppose : Mina, gériatre désenchantée qui trouve du réconfort auprès des vieux qu’elles soignent, et Vali, candide chanteuse qui anime les mariages en rêvant de devenir une star planétaire. Alors qu’elles se sont mutuellement effacées de leur vie, le cancer de leur père et Céline Dion vont finalement rapprocher les deux jeunes femmes. Qui, pour se redécouvrir, vont devoir surmonter des années de silence et de non-dit.
Sept ans après Nous York, qu’est-ce que ça vous a fait d’être de nouveau réunies sur un plateau de tournage ?
Leïla Bekhti : Le premier jour du tournage, on avait l’impression de s’être retrouvées après une très longue absence. C’était étrange parce qu’on est très proches dans la vie et qu’on se voit régulièrement. Au-delà de ça, les retrouvailles étaient très joyeuses ! On était émues car on savait que c’était une grande chance de pouvoir à nouveau faire un film ensemble. C’est toujours un luxe de pouvoir tourner avec les gens qu’on aime.
Géraldine, qu’est-ce qui vous a poussé à réendosser le rôle de réalisatrice ?
Géraldine Nakache : Je ne me suis pas laissé le choix. J’avais besoin de raconter cette incapacité à communiquer au sein d’une même famille et de montrer à quel point il est difficile de libérer la parole. Il fallait aussi que j’assume l’héritage de Tout ce qui brille (premier film réalisé par Géraldine Nakache, qui a fait 1,3 million d’entrées, NDLR). On m’a tellement demandé une suite à ce film-là, que je n’étais pas certaine d’avoir le droit de faire un film différent…
Comment arrive-t-on à être à la fois devant et derrière la caméra ?
Géraldine Nakache : En travaillant deux fois plus ! Il fallait que mon équipe technique rentre dans ma tête, raison pour laquelle la préparation du tournage a été très longue. Et puisque j’incarne une choriste, il y a eu un vrai travail préparatoire au niveau du chant. Je pensais qu’être une chanteuse de salle de bain suffirait pour le rôle, mais pas du tout ! C’est un vrai métier qui nécessite de s’entraîner physiquement et mentalement. Le bilan que j’ai tiré de tout ça, c’est qu’il n’y aura pas d’album de Géraldine Nakache après le film !
« Jouer la détestation,
ça n'est pas que deux lignes
de dialogue »
Qu’est-ce que ça fait d’être dirigée par son amie ?
Leïla Bekhti : J’aime travailler avec elle car c’est quelqu’un de très exigeant. Elle ne lâche pas tant qu’elle n’obtient pas la prise qu’elle veut, tout en restant à l’écoute de ses acteurs. Notre proximité fait que je peux lui faire part de mes observations ou de mes doutes sur certaines scènes. De son côté, elle n’a pas à prendre des pincettes avec moi pour me dire quand elle n’est pas satisfaite. Il n’y a pas d’égo entre nous : si elle me fait refaire 20 fois la même scène, je ne prends pas la mouche. Au contraire, ça me galvanise !
Vous avez participé à la création de votre rôle ?
Leïla Bekhti : Non…
Géraldine Nakache : Mais elle a participé à la création du film ! Elle a lu toutes les versions du scénario – et je peux vous dire qu’il en a eu un bon nombre – parce que j’avais besoin de son regard. La relation qu’on a dans la vie nous sert beaucoup dans ce genre de situation. Au-delà du fait que c’était la meilleure personne pour interpréter le rôle, c’était aussi la meilleure personne pour comprendre ce dont j’avais besoin de parler. Et puis, c’était amusant de ne pas devoir se supporter dans un film alors qu’on s’adore dans la vie !
Justement, quand on s’apprécie autant, n’est-ce pas difficile d’interpréter des personnages qui ne s’aiment pas ?
Géraldine Nakache : Au contraire, je dirais même que c’est plus simple ! Du fait qu’on s’entende bien, on s’autorise à aller plus loin dans l’interprétation. Car jouer la détestation, ce n’est pas que deux lignes de dialogue : il y a aussi quelque chose de physique dans le regard et l’attitude qui peut être violent.
Leïla Bekhti : Dès la lecture du scénario, j’ai trouvé génial qu’on ne puisse pas se blairer ! D’autant que Géraldine a vraiment un talent au niveau des dialogues qui sont toujours dans le bon rythme. On nous demande souvent si ce qu’on fait est improvisé alors que tout est minutieusement écrit.
« Accueillir les événements extérieurs
d'une manière différente
crée une impossibilité de dialoguer »
Pourquoi avoir choisi Céline Dion comme fil conducteur du film ?
Géraldine Nakache : Avec Leïla, on partage une vraie passion pour Céline Dion. C’est une des plus grandes voix du monde, c’est un personnage extraordinaire sur scène et en interview. Et parce qu’elle a un parcours incroyable : c’est la cadette d’une famille de 14 enfants, qui grandit dans un petit village du Québec et qui finit à Las Vegas ! Ce film est aussi un hommage aux artistes musicaux car donner de sa voix, c’est très intime et très puissant. Et quand on refuse de donner sa voix, comme le personnage interprété par Leïla, ça raconte aussi beaucoup de choses.
Leïla, quel regard portez-vous sur Mina, votre personnage ?
Leïla Bekhti : Je l’ai trouvé fabuleux à interpréter car il est totalement éloigné de ce que je suis. Dans la vie, j’ai besoin communiquer, qu’on me dise les choses en face. Et puis, j’aime quand les gens se lâchent ! De prime abord, les gens comme Mina me font un peu peur, mais j’ai fini par m’y attacher car son attitude cache une vraie souffrance. Plus globalement, je trouve intéressant d’interpréter deux sœurs qui ont été élevées avec le même amour mais qui accueillent les événements extérieurs – notamment la mort de leur mère – d’une façon complètement différente, ce qui créé cette impossibilité de dialoguer.
Comme votre acolyte, aimeriez-vous passer derrière la caméra ?
Leïla Bekhti : Oui, c’est dans un coin de ma tête… Plus que ça d’ailleurs, puisque j’ai commencé l’écriture d’un scénario, ça devient concret. Je ne peux pas trop en dire pour l’instant, mais ce qui est sûr, c’est que j’ai envie que mes personnages se fassent mal. Très mal. Et je peux d’ores et déjà dire que je ne jouerai pas dedans pour me concentrer uniquement sur mon rôle de réalisatrice.
Propos recueillis par Yohan Cecere
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